Le 15 décembre, l’UE a inscrit Jacques Baud sur sa liste de sanctions, aux côtés d’autres personnes, pour ce qu’elle qualifie de « diffusion de propagande pro-russe et de désinformation sur la guerre en Ukraine ».

Petit rappel, cet ancien colonel et analyste stratégique est Suisse mais vit à Bruxelles, les sanctions à son encontre l’empêchent de quitter le pays.
« Mes comptes sont gelés et je n’ai pas le droit de voyager au sein de l’UE. Autrement dit, je ne peux pas rentrer dans mon pays… Je suis accusé de faire de la propagande pour la Russie et d’être responsable de la mise en œuvre de stratégies ou de désinformation imputables à la Russie. Ils ignorent même si la désinformation que je suis censé diffuser est bien destinée à la Russie…» — Colonel Jacques Baud
Selon les institutions européennes, aurait, par ses interventions médiatiques, relayé des thèses jugées pro-Kremlin.
Autrement dit, faire son métier d’analyste, produire une lecture stratégique qui ne coïncide pas avec la narration officielle européenne, lui vaut aujourd’hui des sanctions.
– Interdiction d’entrer ou de transiter par les pays de l’Union européenne.
– Gel des avoirs dans la zone euro.
– Interdiction pour toute personne ou entreprise de l’UE de lui fournir des fonds ou des ressources.
La justification avancée est celle des « menaces hybrides » … c’est pratique.
L’UE vient de franchir un pas de plus dans l’autoritarisme.
Ce n’est plus de la censure classique.
Personne ne nous interdit de parler. Mais si nous parlons mal, nous devenons juridiquement radioactifs.
L’Union européenne détourne ici un outil administratif de politique étrangère (les sanctions ciblées) pour contraindre les discours critiques.
Sans juge. Sans procès. Sans contradiction. Sans défense.
Une décision politique, prise par le Conseil, sur la base de rapports internes, pour faire taire. Et faire un exemple.
On est dans l’arbitraire le plus total.
C’est un problème démocratique majeur.
Un problème grave car ces sanctions ne punissent aucun acte matériel, aucun crime, aucune infraction pénale. Elles punissent des discours, des analyses, des opinions.
Or, dans une démocratie, même des opinions dérangeantes ou jugées fausses doivent pouvoir être exprimées sans crainte de sanction politique !
Levitsky et Ziblatt l’ont montré avec précision dans How Democracies Die: les démocraties ne meurent pas seulement par des coups d’Etat ou des suspensions brutales des libertés. Elles meurent quand les normes démocratiques sont contournées au nom de la protection du système.
C’est exactement ce qui se joue sous nos yeux.
Si la Suisse n’assume pas la défense de ses ressortissants, lorsque ceux-ci sont sanctionnés par une autorité étrangère sans procédure judiciaire, sans droit d’être entendu, sans condamnation pénale, alors elle accepte que des décisions politiques étrangères produisent des effets graves sur ses propres citoyens. C’est accepter une ingérence étrangère.
D’après ce qui est publiquement disponible pour l’instant, il n’y a pas de prise de position de grandes ONG internationales de défense des droits humains (comme Amnesty International, Human Rights Watch, …) contre ces sanctions.
Rien de largement relayé dans les médias grand public ou sur leurs canaux officiels.
Ce silence est encore plus terrifiant que la dérive autoritaire de l’Union européenne.
Le lieutenant-colonel Daniel Davis présente l’affaire comme une contradiction flagrante avec les principes démocratiques occidentaux, s’interrogeant sur la manière dont un homme peut être ruiné et réduit au silence « dans cet Occident démocratique… où règne la liberté d’expression et tout le reste », sans avertissement, procès ni recours légal. Il souligne à plusieurs reprises l’ironie de la situation : l’UE – « qui n’est pas en guerre contre la Russie » et qui commerce toujours avec elle – a choisi de geler des avoirs et de restreindre la circulation simplement pour des opinions qui lui déplaisent, qualifiant cette action d’« antithèse même de la démocratie ».
Le colonel Jacques Baud relate les faits avec une précision chirurgicale. Il a appris la nouvelle par un article de presse ; la notification officielle n’est intervenue qu’à la publication de l’article. Depuis, « tous mes comptes bancaires sont gelés et je n’ai plus le droit de voyager au sein de l’UE ». L’accusation est celle de « propagande pour la Russie », plus précisément pour avoir prétendument propagé une théorie du complot selon laquelle l’Ukraine aurait provoqué l’invasion. Baud réfute catégoriquement cette accusation, affirmant qu’il n’a fait que citer l’avertissement d’un haut responsable ukrainien.
Il insiste sur sa démarche méthodique, digne d’un analyste du renseignement : refuser toutes les invitations des médias russes, privilégier les sources ukrainiennes et américaines et éviter soigneusement tout langage propagandiste. Pourtant, il relève le paradoxe central : « être aussi objectif que possible… est toujours perçu comme pro-russe. »
Tous deux soulignent que la sanction est politique, et non juridique. « Il n’y a pas de jugement. Il n’y a pas de tribunal », déclare Baud. « Je n’ai pas le droit de me défendre. » Les conséquences surréalistes achèvent de dresser le tableau. Il pourrait devoir demander une « dérogation humanitaire » rien que pour acheter de quoi se nourrir : « On est revenus au Moyen Âge », remarque-t-il. Un journaliste ayant vécu en Allemagne de l’Est lui a confié que sa situation était la même, « à une différence près… on prévenait les gens une semaine à l’avance. L’Union européenne est donc pire que l’Allemagne de l’Est. »
Voilà donc la gravité de ces sanctions pernicieuses qui pendent au nez de chaque citoyen qui aura la mauvaise idée de déplaire à la commission européenne.
Dans la même lignée : https://www.youtube.com/watch?v=xOFlV5lbpCQ&list=TLPQMjcxMjIwMjXaeGalFUbO5w&index=12
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