Bonjour,
Comment allez vous ?
Je vous partage ce matin un texte extrait du site de Nicole Montineri.
Belle lecture
Mabelle
Il y a une grande méprise sur le sens du mot amour. On lui attribue souvent une coloration sentimentale. On le voit ordinairement là où n’existe qu’une dépendance affective ou un attachement exclusif à un être. Ce soi-disant amour se nourrit de nos espoirs, de nos attentes de réconfort, de nos besoins de protection, de nos quêtes de plaisirs, de nos désirs de posséder ou de dominer l’autre. Nous nous efforçons de le faire entrer dans le monde conflictuel de nos petits moi crispés sur des peurs et des blessures. C’est ainsi que, loin de vivre le bonheur tant recherché, nous connaissons le désarroi permanent, entretenu par un tourbillon de plaisirs/malheurs qui ne produit que frustrations et souffrances. Car l’amour est absent là où il y a demande, attente, possession, marchandage, soif de sécurité, désir d’enfermer. L’esprit manipulateur et instable ne peut le toucher. L’amour échappe à toute emprise mentale, à tout désir d’appropriation. Il est libre. Comme la vie.
L’amour, c’est l’énergie qui parcourt l’univers, qui le pénètre et le soutient, c’est le flux cosmique impersonnel, intemporel, qui se meut en lui-même, sans direction, sans cause et sans but. C’est l’espace vibrant de la vie, silencieux, vide, qui coule en nous en abondance si nous le laissons se déployer.
Nous ne comprenons pas réellement ce qu’est la vie, cette énergie aimante qui nous traverse sans condition, avec douceur et puissance. Nous bloquons en permanence son mouvement en nous exprimant sur le mode du refus ou de la crainte. Nous ne sentons pas que nous sommes reliés à sa totalité et nous avons peur. Nous nous percevons comme des êtres séparés, agressés en permanence par un monde hostile qui ne répond pas à nos propres désirs. Nous nous attachons à des êtres, mais nous manquons de confiance, qui est l’expression spontanée de l’amour. Nous nous isolons de plus en plus, nous nous fermons à l’énergie qui anime tout l’univers. Nous sommes incapables de rester ouverts, sans motif, dans une attention sensible renouvelée d’instant en instant, qui dévoile notre vulnérabilité mais aussi notre grandeur. C’est le besoin égotique de sécurité qui crée ce désert que nous persistons à appeler amour. Or, l’amour ne peut exister que lorsque l’illusion du moi distinct a été dépassée, par-delà la fausse liberté qui sépare. Il ne force pas l’entrée de la carapace forgée par nos ego. Il n’est pas l’expression d’un processus mental, ne se provoque pas : il nous pénètre librement lorsqu’il n’y a plus personne qui poursuit quelque chose, lorsque l’esprit se calme, lorsque nous sommes en profondeur au coeur de la vie, totalement réceptifs à ce qu’elle nous propose. Patient, il nous attend et s’offre à nous dés que le moi s’efface dans l’abandon de ses vouloirs, s’oubliant dans l’espace de paix dévoilé. Il ne naît pas en nous, mais nous sommes nés de lui. Il n’est autre que la substance véritable de notre être.
Au lieu d’échafauder des théories prétentieuses sur la vie, regardons ce qui est là, ce qui s’offre à nous, pénétrons au cœur de chaque instant. Nous rencontrons l’amour à chaque seconde de notre existence, dans chaque petite chose ordinaire de notre quotidien, un geste tendre, une écoute patiente, une parole bienveillante. Il est dans le respect du chemin de chacun, dans l’attention sensible à la souffrance d’autrui, dans le soin à un corps affaibli, dans l’acceptation de l’impermanence au cœur des êtres et des choses.
Tout ce qui se manifeste est la vie, pure et aimante en son essence. Tout ce qui apparaît est le mouvement de l’amour qui vibre intensément. Même dans la plus cruelle des circonstances, cette énergie intelligente n’est jamais hostile. Elle nous manifeste son amour à travers toutes les expériences qui nous sont proposées. Elle nous apporte ce dont nous avons besoin pour grandir. Elle prend soin de nous, si nous la laissons s’accomplir en nous, si nous nous acceptons en mouvement avec son mouvement. Nul besoin de but égotique. Les choses se réalisent d’elles-mêmes, dans le fait même de vivre. Le sens de notre destinée terrestre est d’aller vers nous-mêmes, à la source de l’énergie de vie, dans ce lieu d’amour où nous nous découvrons vulnérables et protégés.
Vivons en profondeur, pleinement présents à la vie qui nous porte, quittons la poursuite effrénée où ce monde agité nous entraîne. Essayons de parvenir à la tranquillité intérieure, même au milieu de nos multiples activités. Nous manifestons l’amour dés que nous nous abandonnons à la plénitude du mouvement de la vie et que nous offrons à ceux que nous côtoyons notre paix dévoilée. Habituons-nous au silence de notre être profond. C’est en son sein que l’amour est perçu. Nous le sentons émerger de ce silence, nous traverser et se diffuser librement autour de nous. Cette énergie est d’une intensité incroyable et cependant sa vibration nous pénètre avec douceur. Libérons à l’intérieur de nous l’espace infini qui l’accueillera et lui permettra de s’écouler spontanément. Allégeons-nous, soyons transparents afin de permettre à la Conscience suprême de se refléter amoureusement dans notre être.
Lorsqu’il fut donné à ma conscience de s’ouvrir et de se déployer à l’infini, révélant la Réalité immuable derrière les apparences, l’énergie d’amour se répandit dans l’espace grand ouvert et l’imprégna durablement de sa pulsation tendre et puissante. Il n’y avait personne qui aimait et « je » n’avait personne à aimer. Il y avait seulement l’Amour, sans limite, vécu intensément dans une perception intemporelle de non-séparation. Dépourvue de toute identification égotique, la conscience fut pénétrée d’une plénitude rayonnante au sein de l’espace immobile, vide d’objet et cependant plein du potentiel infini de création. La réalisation de son union indissoluble avec l’essence cosmique l’inonda d’une joie inaltérable !
Nous nous sentons alors tellement vastes que nous ne pouvons plus infliger aux autres ou à nous-mêmes de la souffrance. Après la découverte du lien qui unit le cosmos entier, il n’y a plus aucun tourment dans notre relation à ce monde. Nous vivons sans peurs. Nous ne sommes pas pour autant épargnés par les aléas de l’existence, mais nous les traversons avec la liberté qui nous accompagne.
Tout est Lui, un flot abondant et éternel d’énergie universelle, tout émerge de cette source illimitée d’une intensité absolue et y retourne. Lorsque nous permettons à son flux d’être en contact direct avec notre espace intérieur, dans l’effacement du moi, dans le vide du silence, l’amour se déploie, joyeux, touche chaque être, profondément, et revient, inaltéré, à sa source. La conscience maintenue sur la source de vie, nous portons un regard unifié sur les êtres humains, sur les animaux, sur la nature. Tout autre regard est superficiel.
Laissant notre sensibilité ressentir la puissante vibration cosmique, nous nous plaçons dans une perception de présence continue, de non-séparation. Notre joie est permanente car elle ne dépend plus de circonstances extérieures. Chaque contact avec la réalité révèle sa beauté. La paix s’installe durablement en nous, dans la fluidité du présent continu. Chaque évènement est vécu dans une attention sensible, dans une ouverture sans condition. Nous sommes dans l’espace au sein duquel tout se déroule, bien plus vaste et plus profond que notre esprit. Nous sommes, de tout notre être, silencieux et confiants, au cœur de chaque instant de notre existence, qu’il soit triste ou heureux. Vivre ainsi ne laisse aucun regret, aucune blessure. Nous ne rejetons rien de ce que la vie nous présente, car nous savons que tout est don de ce flux cosmique qui se déverse en une expansion féconde et infinie.
Tout ce qui vient à nous est la grâce intemporelle de la vie. Dés que nous avons réalisé ceci, nous voyons chaque chose dans sa perfection. Nous avons la certitude d’appartenir à une unité ayant un sens. Nous accueillons spontanément le mouvement intelligent qui œuvre en nous et en chaque chose, nous incarnons son offrande en épousant sa fluidité, en nous abandonnant à sa totalité. Vibrer en harmonie avec son expression est amour. Sa beauté reflétée se trouve dans notre acte même de vivre, sans séparation, sans tension.
Si nous observons le monde selon les apparences, nous ne voyons que son chaos. Mais derrière l’illusion des phénomènes dans laquelle il se débat, il y a le flux éternel qui se meut en lui-même, enveloppe, soutient, pénètre… Tout est saturé d’essence cosmique. Nous évoluons à chaque seconde dans un océan d’amour et cependant, sa réalité n’est pas perçue. Nous ne sentons pas la puissante vibration qui nous porte… Nous croyons ordinairement que l’amour est un sentiment qui émane de notre propre personne. Or, tout ce qui apparaît est l’amour, même si notre pensée l’interprète comme absent. Il n’a ni commencement, ni fin. Il ne cesse de se manifester à travers toutes les formes. C’est cette même énergie que nous exprimons lorsque nous aimons un être. Il n’y a qu’un seul amour. Notre tâche ici est de nous relier à cette énergie, de placer notre conscience dans une perception de présence continue. Nous vivons en elle, nous y sommes reliés substantiellement. Tout est parcouru de cette seule et unique énergie éternellement en mouvement. Nulle part et jamais, nous ne pouvons être hors de l’amour. Il englobe toutes les formes de vie, sans condition.
Dés que nous découvrons ce flux qui imprègne tout l’univers, dés que nous le voyons en chaque chose, une joie inébranlable nous pénètre. Nous vivons désormais sans peur, nous ne divisons plus la vie, nous ne nous opposons plus aux autres. Notre présence est détendue, ouverte à soi-même et aux autres. Le monde devient ce contenu de paix, au sein même de son mouvement incessant. Nous voyons tout ce qui se manifeste rempli de la même énergie. Notre propre mouvement part du silence, de l’espace largement ouvert où l’énergie de vie –d’amour- se répand à profusion. L’ego, affaibli, s’efface… Les tourments provoqués par son égoïsme, son désir de possession, son besoin d’attachement, sont emportés par le flot puissant qui entre. On réalise que seule l’unité existe. On se voit dans tout ce qui vit et on voit tout en soi-même. Rien ne nous est plus séparé. Dés lors, chaque parole, chaque geste, chaque acte, mûs ainsi par l’abondance de l’énergie consciemment accueillie et reflétée, voyagent loin dans l’espace et transcendent le temps.
L’amour manifesté est notre éveil à l’unité de la vie. Nous avons rejoint notre part éternelle, cette énergie qui imprègne toute chose, contenue dans chaque cellule, dans chaque particule de matière. Comment pourrait-elle être différente pour chacun d’entre nous ? Nous portons tous l’énergie d’amour en nous. Celui qui accepte de s’y relier en conscience est parcouru du flot vibrant et éternel de la vie. Il a une vision globale, intégrant tout, sans choix, sans discrimination. Aucun conflit ne peut plus s’élever. Où est désormais la violence exercée contre soi et les autres ? Avoir cette intelligence de la globalité, c’est vivre à partir de la conscience pure, à partir de notre véritable nature. C’est notre enfermement égotique qui nous donne l’illusion d’être séparé du courant universel et qui répand en conséquence le chaos sur la terre.
Nous avons tous la capacité de parvenir à cette perception d’unité, laissant le regard que nous portons sur le monde être le miroir de notre conscience, voyant dans chaque forme de la vie une expression de l’amour infini. Nous sommes alors présents à notre être véritable, reconnu dans sa nature éternelle de paix, et présents aux autres, à leur amour parfois silencieux, à leur quête souvent maladroite, à leurs souffrances inexprimées. Nous sommes réceptifs à tout ce que la vie manifeste, participant avec légèreté et responsabilité à la danse joyeuse du cosmos. Nous sommes animés d’une énergie intacte et non plus morcelée par notre petit moi. Nous gardons entière la puissance de la source et la laissons se répandre telle quelle, indivisible par-delà son flot diversifié à l’infini. Nous voyons la totalité du cosmos rayonner en chaque être animé du même souffle d’éternité.
L’amour n’a pas d’opposé, car il est la vie même, une, infinie, qui s’accomplit librement en elle-même.